Parler de moi, à ce stade de ma vie, c’est parler du Longchamp… c’est quasi la seule interaction sociale que j’ai actuellement. Combien y a-t-il de Longchamp, bar PMU, en France ? Une bonne pelletée je pense. Celui que je fréquente trop assez régulièrement depuis plus d’un an est un endroit qui me rappelle le temps où je voyageais pas mal. Les ambiances de quais de gare, les transits dans les aéroports, les no man's lands non sans surprise, les stopovers au milieu de nul part… ça a toujours été mon truc. En fait, je n’ai jamais vraiment atterri, ni dans ma tête, ni dans ma vie. Ce bar, c’est un peu mon aéroport “d’occasion” à moi ; il atterrit là, n’importe qui, n’importe quand… parfois n’importe comment. Derrière le comptoir, un p’tit asiatique déjanté, ironiquement drôle et adorablement psychopathe tente de garder l’ordre dans l’établissement en buvant un whisky pour trois consommations servies.
Situé en face de la gare et côté clientèle, il y a les habitués du quartier : genre le tout Belsunce marseillais avec leur café / verre d’eau qui leur fait tout l’après-midi, les petits vieux indécrottables qui notent même plus les changements de propriétaire, les piliers de bar imbibés avec leurs brèves de comptoire, leur drague hétéro ou homo lourde, les turffeurs et autres joueurs de FDJ. Parmi les consommateurs sobres financièrement, il y a également les nouveaux arrivants, fraîchement débarqués de leur pirogue et majoritairement black qui trouvent, au grand damne du patron, un endroit pour se poser et passer le temps. Beaucoup ne viennent certainement pas de pays en guerre et ne sont pas, dans le strict respect de la loi, éligible à l’asile. Cela ressemble davantage, vu de l'extérieur, à une immigration économique. C’est, à mon avis, tout aussi honorable. Se résoudre à opter pour une traversée redoutable en mer au péril de leur vie pour venir en Europe afin d’échapper à un environnement qui de toute façon ne leur apportera rien et ne permettra pas de faire vivre leur famille, est un choix impérieux que nous Occidentaux, avons de la peine à concevoir et à accepter. Intimement, je pense que la planète appartient à tout le monde. Pourtant, tel qu'elle est stupidement régentée, je suis de ceux qui ne sont pas pour l’immigration (massive), je suis bien trop conscient qu’ils viennent se chercher en France une existence que nous ici on ne peut déjà plus s’offrir depuis longtemps.
Jeunes, beaux comme des dieux, je me dis parfois, que parmi eux, il doit bien y en avoir un ou deux dont la perpendiculaire penche vers les mecs “whity”. Si leur carrure est proportionnelle à leur équipement, il est sûr de toute façon que je ne suis pas câblé pour. Puis, j’ai déjà fait dans l’ethnique, cela demande une ouverture d’esprit et une patience que je n’ai plus. Et, il y a, les plus intéressants, ces inconnus de passage. Ceux que l’on zieute du coin de l'œil en s’imaginant un regard engageant, certains avec un sourire aussi dangereux qu’une fuite de gaz et au dialogue furtif qui ouvrent l’imagination sur mille vies possibles. Ils viennent prendre un café, une bière, acheter un paquet de clopes en attendant une correspondance et laissent derrière eux le regret de ne pas les avoir suivis ou lâché un 06 avant de disparaître à jamais. Au milieu de cette faune, il y a moi, qui, depuis le début de l’année ait arrêté de faire défiler les ½ de bières ; asthénique, invisible et transparent, j’observe passivement devant mon diabolo fraise.
(À suivre…)
[+]Album George Dureau
[+]La p’tite musique qui va bien avec ⏯️ Burna Boy - “African Giant”
1 commentaire:
A lire ton texte (avec deux/trois trouvailles magnifiques, tu es loin d'être un observateur passif !!!
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